Le plaidoyer pour les droits culturels : entre local et international

Au niveau international, les 7, 8 et 9 décembre derniers, a eu lieu à Bruxelles le dernier module de la formation-action Paideia du Réseau Culture 21, organisée sur place par la Plateforme d’observation des droits culturels et l’Astrac. La thématique de ce module portait sur le plaidoyer en faveur des droits culturels.

Les participant·es franco-belges ont pu échanger sur l’avancée de leur démarche locale respective ici en Fédération Wallonie-Bruxelles avec la Plateforme d’observation des droits culturels et l’Astrac, ainsi qu’à Rouen, Dunkerque, en Essonne, à Nantes, en région Auvergne-Rhône Alpes, en Drôme, à Lyon, à Paris.

Des participant·es externes belges ont été invité·es dans le cadre d’un forum ouvert autour des pratiques en matière de droits culturels. Les échanges d’expériences entre Belgique et France ont été riches et variés, qu’il s’agisse des enjeux de mobilisation et de culture commune autour des droits culturels, de la question de l’impact et de l’évaluation de l’effectivité des droits culturels, des tensions entre management et droits culturels, etc. Le lendemain, des exposés autour du plaidoyer, de l’interdépendance et l’indivisibilité des droits fondamentaux ont été partagés par Mylène Bidault et Patrice Meyer-Bisch de l’Observatoire de la diversité et des droits culturels à Fribourg, ainsi que Dragana Korljan qui officie au Haut-Commissariat des Droits humains aux Nations Unies à Genève. Des ateliers thématiques autour des dimensions culturelles des autres droits humains ont été déployés avec des interventions de Laurence Cuny et Jean-Pierre Chrétien-Goni autour des libertés artistiques, de Magali Ramel autour des droits à l’alimentation, d’Anne-Catherine Lorrain autour du numérique et des biens communs, de Christine Mahy autour de la grande pauvreté et l’accès aux droits de base, de Basil Gomes autour du droit à l’identité linguistique et culturelle des personnes sourdes.

Le mercredi 7 en soirée, les participant·es ont pu écouter des chargé·es de projet du centre culturel de Forest, le Brass, et du centre culturel d’Evere, l’Entrela’. L’occasion a été prise pour partager autour d’actions visant à plus grande effectivité des droits culturels que ce soit Ecran total avec des jeunes et en milieu numérique au Brass, ou le Quartier durable City Zen avec des citoyen·nes autour d’un potager collectif avec l’Entrela’.

Avec cette dimension internationale, nous croisons la dimension locale du territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles dans lequel s’inscrit la Plateforme avec la recherche participative menée avec les Centres culturels de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Pour insister sur le plaidoyer pour les droits culturels et à la suite de notre article « Les droits culturels au coeur des politiques culturelles? » et du rapport « Un futur pour la culture » de juillet 2020, nous reprenons en ce sens le discours que Mme Bénédicte Linard, Ministre de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles a énoncé lors de la journée de l’éducation permanente ce vendredi 21 octobre 2022 à la Marlagne. Ce discours appuie l’importance des droits culturels et leur diffusion à travers les politiques culturelles des différents secteurs de la Fédération Wallonie-Bruxelles, en particulier l’éducation permanente. Un bel exemple de plaidoyer en faveur des droits culturels !

« Bonjour à toutes, bonjour à tous,

La dernière « Journée de l’éducation permanente » a eu lieu en 2014. Il y a
donc presque 10 ans. En une décennie, notre monde, notre société a été
radicalement bouleversée.

Peu d’entre nous auraient pu il y a 10 ans prévoir la crise sanitaire que nous
avons traversée et qui nous a toutes et tous profondément marqués. Qui aurait pu imaginer qu’elle serait suivie d’une invasion de la Russie en Ukraine, engendrant une crise énergétique inédite.

Crise sociale, crise démocratique, crise climatique… Ces crises successives ont un impact majeur sur notre société, sur nos relations aux autres, sur notre démocratie, sur notre « vivre ensemble ». Elles nous obligent à redéfinir nos priorités, elles nous obligent à repenser notre rapport aux autres et au monde. Non, on ne peut pas continuer à faire « comme on a toujours fait ».

Je sais que beaucoup d’entre vous attendaient cette journée. Je suis
convaincue que le secteur avait ce besoin de se réunir, de « faire corps« 
ensemble. Une rencontre « en vrai », loin des écrans, qui permet ces échanges informels et pourtant oh combien importants. C’est le premier objectif de cette Journée.

C’est la première fois que cette journée est organisée grâce à une collaboration entre le Service, la Fédération sectorielle (FESEFA), le Bureau du Conseil Supérieur de l’Éducation Permanente et l’Inspection. J’ai eu l’écho d’une bonne ambiance de travail. Je me réjouis de cette belle collaboration et félicite les organisatrices et les organisateurs pour le riche programme de cette journée !

Cette Journée a aussi été conçue dans la perspective de l’organisation d’une
seconde, « en rebond » à celle-ci, l’an prochain. Il ne faudra donc pas attendre 10 ans pour nous retrouver. C’est plutôt une bonne nouvelle !

Franck Lepage, dans sa conférence gesticulée « L’éducation populaire,
monsieur, ils n’en ont pas voulu » raconte comment, en France, l’éducation
populaire a été exclue du Ministère de la Culture et ce dès sa création.

Ce n’est pas le cas en Fédération Wallonie Bruxelles, et c’est une très bonne
chose !

Cela signifie que la critique de la société, la critique du pouvoir, les luttes sociales, politiques, environnementales ont une dimension culturelle. Cette présence de l’éducation permanente au sein de mes compétences de ministre de la Culture signifie que la culture de la démocratie est une des fonctions essentielles des politiques culturelles.

Vous le savez mieux que moi, l’Éducation permanente est un des secteurs
culturels qui est le plus en contact avec les autres politiques publiques – le logement, la santé, le milieu carcéral, le travail social, l’alimentation,
l’enseignement, l’environnement, – et ce secteur est traversé par des questions de société majeures : les luttes contre les discriminations, la décolonisation, la lutte contre la pauvreté…

L’Éducation permanente a, en quelque sorte, un pied dans la culture et un pied dans les autres politiques publiques, ce qui lui donne la capacité de ramener au centre des préoccupations de l’ensemble des secteurs culturels, les luttes, les combats de l’ensemble de la société… Et, de la sorte, garantir que jamais le secteur culturel ne « sera hors sol », que jamais la fonction des politiques culturelles ne soient simplement celles de « vernir » et cacher les rugosités, les aspérités, les conflits de notre société. Ces rugosités, ces aspérités, ces conflits doivent être « apparents », ils doivent être abordés, questionnés, débattus et mis en lumière pour que la démocratie fonctionne.

L’Éducation permanente est fondamentalement un secteur de « contre-
pouvoir »
, il permet que le pouvoir politique ait face à lui des interlocutrices et interlocuteurs structurés, vigilants, issus de la société civile.

L’Éducation permanente consolide, renforce, arme la société civile, le tissu associatif, augmente ses capacités d’expression. En ce sens il est aussi une réponse à la crise de la représentativité et de la confiance envers le monde politique que traverse nos systèmes démocratiques.

Au sein de l’éducation permanente, chacun est reconnu comme autrice et
auteur de changement, et ce secteur fait vivre un espace de débat entre les citoyennes, les citoyens et les décideurs politiques.

J’invite donc les associations d’Éducation permanente à chercher toujours plus le contact et à travailler dans le cadre de partenariats avec d’autres opérateurs culturels et à y infuser leurs logiques d’action participative. Chacun a à y gagner.

La présence de la présidente du Conseil supérieur de l’éducation permanente au Conseil Supérieur de la Culture vise à établir cette porosité entre le secteur de l’EP et les autres secteurs de la culture qu’on a eu trop tendance à séparer. Et je salue d’ailleurs la présence aujourd’hui de la vice-présidente du CSC, un indice qui montre que cette transversalité, ce décloisonnement, devient concret.

Mon souhait, c’est de voir naitre toujours plus de partenariats et de
transversalité entre des associations d’éducation permanente et des
bibliothèques, des musées, des théâtres, des compagnies, des artistes, etc.
C’est ce qui a été proposé par les deux appels à projet “Un futur pour la
culture” ouverts à tous les acteurs culturels, y compris l’éducation permanente.

Je le disais, l’éducation permanente entre pleinement dans les politiques culturelles, et en tant que Ministre de la Culture, je veux marquer mon action en œuvrant à décloisonner ce secteur culturel.

Outre la question de la transversalité, vous le savez, depuis que je suis Ministre de la Culture, la question de l’accès à la culture est aussi une de mes priorités.

Mais cette question – et c’est important ! – je ne l’aborde pas uniquement
comme l’accès à des spectacles, des expositions, des concerts, via un travail de médiation. Il est en effet essentiel que cet accès à la culture soit entendu
comme une participation, comme un accès aux moyens d’expression culturelle pour le plus grand nombre et notamment pour les personnes minorisées.

Je terminerai en rappelant qu’il y a en Belgique francophone une véritable
culture de l’Éducation permanente, un héritage, un ancrage que beaucoup nous jalousent. Cet héritage, nous devons en être fiers et le valoriser.

L’éducation permanente est à mes yeux un enjeu primordial dans notre
démocratie, et elle a toute sa place au cœur de nos politiques culturelles.
Travailler « au rapprochement entre les lieux de décision et les personnes », c’est d’ailleurs en ces termes que le Conseil Supérieur de l’Éducation
permanente identifie la mission des associations d’Éducation permanente. C’est aujourd’hui un enjeu démocratique majeur, dans un contexte où il nous faut recréer du lien, au sein de la société, ainsi qu’entre les
citoyennes et citoyens et le monde politique,
face aux nombreuses crises et enjeux actuels majeurs.

Je vous remercie. »

Bénédicte Linard, ministre de la Culture et vice-Présidente du Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles

7-9/12/22 – Formation et rencontres franco-belges autour des droits culturels

La Plateforme d’observation des droits culturels de Culture & Démocratie et l’ASTRAC s’associent dans le cadre du cycle Cultiver les droits culturels. Expérimenter Paideia pour contribuer à l’appropriation des droits culturels en facilitant leur traduction dans les pratiques, et vice versa.

Dans ce contexte, un temps d’approfondissement et de rencontres franco-belges sera organisé avec Réseau Culture 21, le mercredi 7 décembre après-midi et soirée et la journée du jeudi 8 décembre à Forest (Bruxelles).

L’initiative s’intègre dans une formation longue de Réseau Culture 21 dont nous accueillons le module de clôture en Belgique !

Le programme prévoit des échanges de pratiques franco-belges et une journée de réflexions et de discussions sur le développement du plaidoyer pour les droits culturels et le rôle des instruments internationaux.

Plus d’informations ici

Nous avons la chance de pouvoir accueillir à cette occasion une bonne trentaine de nos collègues et complices qui souhaitent aller plus loin dans leurs explorations des droits culturels ! Une connaissance de base de ces droits est attendue ; une certaine familiarité avec la démarche Paideia sera utile.

Attention, si vous souhaitez participer à tout ou une partie des moments de formation-rencontres, le nombre de places étant limité, nous vous invitons à vous inscrire sans attendre ! Pour la même raison, nous pourrons décider, en fonction de l’affluence, de donner la priorité à une personne par organisation.

Clôture des inscriptions le 28 novembre.

Au plaisir d’échanger et de vous compter parmi nous !

20/10/2022 – la Journée #3 du cycle Cultiver les droits culturels

Ce 20 octobre dernier avait lieu la 3e Grande Rencontre du cycle Cultiver les droits culturels: expérimenter Paideia. Cette journée était organisé par la Plateforme d’observation des droits culturels de Culture & Démocratie et l’Astrac, réseau des travailleur·ses en centres culturels, au Centre culturel d’Ottignies Louvain-La-Neuve.

Autant d’images qui témoignent d’une journée enrichissante ! Tant de marques d’intérêt, de démarches énergiques et de réflexions dans les échanges entre travailleur·ses de centres culturels en Fédération Wallonie-Bruxelles et au-delà.

Un pas de plus pour faire culture commune autour des droits culturels !


Voici les principaux outils utilisés dans le cadre du cycle de travail.
N’hésitez pas à vous les approprier!

  • Vidéo: Quelques notions-clé des droits culturels selon la Déclaration de Fribourg expliquées par Patrice Meyer-Bisch; Christine Saincy, Milène Bidault, Jean-Pierre Chrétien-Gony et Luc Carton
  • Carnet: À la découverte des droits culturels guidé·e·s par la Déclaration de Fribourg et la démarche Paideia.
    La Déclaration de Fribourg déclinée à travers 8 droits ou notions fondamentales.

    Fichier en format pdf pour impression sous forme de livret
  • Effectivité des droits culturels. Fiche pour observer et analyser une action ou une pratique au regard des droits culturels.
    Outil d’auto-évaluation d’une action/pratique au regard des 8 droits de la Déclaration de Fribourg. L’analyse s’effectue au fil d’allers-retours entre l’auteur·e de la fiche et un·e personne formée à la démarche Paideia qui se charge de la relecture et dont les questions invitent l’auteur·e à approfondir ses réflexions. La confrontation de plusieurs analyses réalisées dans un même contexte peut permettre de définir des problématiques, enjeux et propositions communes pour nourrir un plan d’action. Contactez-nous pour plus d’informations.

20/10/22 – Cultiver les droits culturels – journée #3

Cultiver les droits culturels – Expérimenter Paideia*

Les droits culturels: des droits humains fondamentaux consacrés dans différents textes internationaux, portés par une vision de la culture qui cherche à garantir aux personnes de pouvoir cultiver et partager ce qui donne sens à leur existence et à leur développement.

Mais que sont ces droits concrètement ? Comment les reconnaître, les traduire, les faire vivre dans nos pratiques quotidiennes ? Comment en parler autour de nous? Comment se nourrir les un·e·s les autres et faire réseau ensemble ?

C’est autour de ces questions que nous travaillerons lors des rencontres du cycle « Cultiver les droits culturels », guidé·es par la démarche Paideia*.

Une initiative de l’ASTRAC et de la Plateforme d’observation des droits culturels de Culture & Démocratie, accompagnée par Réseau Culture 21.


Journée 3 : 20/10/2022

Un troisième temps de rencontre et d’échange,
de découverte et d’approfondissement
pour (mieux) s’emparer de notions fondamentales
travailler leur mise en pratiques,
partager l’univers qu’elles représentent.


Programme de la rencontre

Le programme qui suit sera affiné et complété dans le courant des jours qui suivent; il peut subir des modifications légères, notamment au niveau de l’horaire.
En fonction du nombre d’inscrit·e·s, les ateliers pourront être dédoublés.

  • 9h00: Accueil, café/thé
  • 9h30 – 12h30: Introduction et travail en ateliers
    • ATELIER 1: « À la découverte des droits culturels »
      Une mise en jeu et en mouvement des notions clé du référentiel – pour les « novices » du cycle.
    • ATELIER 2: « Parler des droits culturels en ses propres mots »
      Des mises en situation pour aller plus loin dans sa maîtrise des droits – pour les personnes qui ont participé aux rencontres précédentes.
  • 12h30: Pause repas
  • 13h30-16h30: Travail en ateliers
    • ATELIER 3: « Analyser ses pratiques au regard des droits culturels »
      Un exercice d’analyse collective d’une action, basée sur l’écoute active.
    • ATELIER 4: « Les droits culturels, pour une meilleure prise en compte des spécificités d’une action? »
      Un forum ouvert nourri des questions apportées par les participant·e·s pour échanger autour d’une thématique et/ou entre actrices et acteurs impliquées dans des actions semblables
  • 16h30: Conclusions et clôture de la journée

Infos pratiques
  • Pour qui ? Pour chaque acteur·ice de terrain intéressé·e. Pour les professionnel·les de la culture, de l’éducation permanente, de l’action sociale… et leurs complices.
  • Quand ? Le jeudi 20 octobre 2022, de 9h30 (accueil dès 9h) à 17h
  • Où ? Au Centre culturel d’Ottignies-Louvian-la-Neuve, avenue des Combattants 41 à 1340 Ottignies
  • Participation financière :
    Avec sandwich: 25 euros par personne
    Sans sandwich: 20 euros par personne
    À payer sur le compte de Culture & Démocratie (IBAN: BE65 5230 8036 6696 – BIC: TRIOBEBB) avec la communication « Cultiver les droits culturels 20/10 – inscription + NOM et Prénom »
  • Inscriptions à l’aide du formulaire pour le 10 octobre au plus tard.
    Attention: Pour garantir la qualité des échanges, le nombre de participant·e·s est limité à 100 personnes.
  • Il n’est pas indispensable d’avoir participé aux autres rencontres du cycle ni de participer à sa suite.

* La démarche Paideia du Réseau Culture 21 (France) propose depuis 2012 un accompagnement pour analyser et faire évoluer les pratiques professionnelles des acteurs publics et associatifs au regard des droits culturels tels qu’ils sont explicités dans la Déclaration de Fribourg (2007).

17/9/22 – Rencontre autour des enjeux actuels des droits culturels

Dans le cadre de l’Université d’été 2022 d’Amnesty International Belgique Francophone, consacrée aux droits économiques, sociaux et culturels,

Patrice Meyer-Bisch, président de l’Observatoire de la Diversité et des Droits culturels et coordonnateur de la Chaire UNESCO droits humains et démocratie à l’Université de Fribourg, et Thibault Galland, coordinateur de la Plateforme d’observation des droits culturels de Culture & Démocratie sont invités à échanger autour des enjeux actuels pour les droits culturels.

Le dialogue sera l’occasion d’exposer les enjeux fondamentaux de la Déclaration de Fribourg en termes de droits culturels et de plaidoyer tant au niveau international que local, et ce, au même titre que les autres droits humains fondamentaux.

Nous reviendrons également sur la situation en Belgique francophone, notamment par le biais de la recherche participative menée par la Plateforme d’observation des droits culturels avec les Centres culturels autour de leur décret de 2013 faisant de multiples références explicites aux droits culturels.

Modération: Maryse Hendrix, coordinatrice culture chez Amnesty

  • Samedi 17 septembre 2022
  • de 14h à 15h30
  • Université de Namur, 94 rue de Bruxelles à 5000 Namur
  • Ouverte à tous·tes mais inscription obligatoire et contribution de 5 à 10€.

Plus d’informations sur le programme complet de la journée et pour l’inscription.

1/9/2022 – Rencontre autour des dynamiques associatives des lieux de soins

À l’occasion de la parution du livre Cent ans d’associatif en Belgique… Et demain ?

Le Collectif 21, Culture & Démocratie et la librairie Météores vous invitent à une soirée de discussion sur les dynamiques associatives et tout particulièrement celles des lieux de soin et de santé.

Nous nous intéresserons aux secteurs des maisons médicales, des maisons et services de santé mentale, comme autant de laboratoires pour penser les possibilités associatives.

Nous aborderons les enjeux liés à l’évolution de ces structures, aux relations nouées avec les politiques publiques et aux militantismes face à elles, à la participation des travailleurs et des populations.

Avec : Aurélie Ehx de L’Autre « lieu », Fanny Dubois de la Fédération des maisons médicales, Pierrot Renaux du Pianocktail, Manon Legrand d’Alter Échos et Mathieu Bietlot de La Maison du Livre.

Modération : Thibault Galland (Culture & Démocratie)

▶︎ Jeudi 01 septembre 2022

▶︎ dès 18h30

▶︎ Au Pianocktail 304, rue Haute – 1000 Bruxelles

▶︎ Gratuit

Lien vers l’évènement: https://fb.me/e/2CRpow0Z3

Santé et droits culturels

La Plateforme a été invitée à contribuer à Santé conjuguée1, la revue de la fédération des maisons médicales à l’occasion de son 40e anniversaire. L’article présente une généalogie des droits culturels visant à tisser des liens avec les secteurs du soin et de la santé.

Si l’on compare la Déclaration d’Alma-Ata, la Charte d’Ottawa ou la Déclaration de Jakarta avec les référentiels des droits culturels tels que la Déclaration de Fribourg ou le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, on constate à quel point ces textes construisent un sens commun.

Les pratiques de soin s’établissent et varient selon l’ordre social, politique et culturel, les acteurs et actrices de terrain et les institutions de la santé appartenant à des luttes politiques et sociales autant qu’ils s’inscrivent dans un milieu culturel selon leurs représentations. Pensons aux multiples conceptions de la maladie, de la souffrance et de la santé, pensons aux divers modèles, structures et cadres sociaux qui permettent ou empêchent l’accessibilité aux pratiques de soin, pensons à la circulation de l’information, à l’éducation et la transmission de recherches et de connaissances médicales, qu’elles soient conventionnelles ou alternatives. Et tout ceci en abordant à peine les enjeux propres au dialogue interculturel au sein des relations entre patients et soignants, que ces enjeux soient liés aux incompréhensions et barrières des langues, aux rencontres et conflits de valeurs, aux différences de dispositions corporelles ou de traditions spirituelles2. La liste de tous les facteurs culturels à prendre en compte reste encore à définir si tant est qu’un jour elle puisse être exhaustive ! C’est là un point à souligner : en situant les réseaux d’acteurs et d’actrices, institutions et pratiques de soin au sein de milieux culturels, nous n’en donnons qu’une photographie cadrée sur une partie du paysage et à une période donnée. Il s’agit d’assumer le caractère situé de ce dont nous cherchons à rendre compte, tant au niveau de l’objet que des méthodes déployées. Ce faisant, la démarche doit appeler à l’échange, au décentrement, à l’exercice critique et à la coopération. Ces représentations ou formes culturelles peuvent toujours évoluer ; les réseaux, milieux et circonstances peuvent toujours s’étoffer ; et donc les pratiques de soin, les acteurs et actrices et institutions de la santé peuvent toujours s’améliorer et progresser vers un projet commun3.

Une invitation à collaborer

Mais en ayant ramassé tout cela, nous n’avons fait qu’enfoncer des portes ouvertes tant sont de plus en plus considérées les dimensions culturelles du soin et de la santé. Depuis 1997, la Déclaration de Jakarta sur la Promotion de la santé au XXIe siècle notamment appelle à collaborer de façon multisectorielle autour de la santé, en connectant les politiques de santé avec l’ensemble des autres politiques publiques4. À cet égard, le domaine du droit condense l’ensemble de toutes ces circonstances, tantôt sous forme de leviers, tantôt sous forme de limites à l’action. Ceci, tout en gardant au moins le mérite d’ouvrir la possibilité d’agir, d’avoir des effets sur l’ordre social, politique et culturel. En témoignent, localement en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, les décrets qui fixent les missions et les conditions d’agrément des associations de santé intégrée tout en leur garantissant des moyens financiers pour réaliser leurs missions.

Plus globalement, nous posons l’hypothèse que les droits culturels offrent une perspective innovante parmi d’autres instruments internationaux. Même s’ils n’ont pas directement force de loi, ils constituent des ressources pour analyser les actions menées dans un milieu, pour évaluer les politiques publiques dans un contexte, et ce, dans une perspective culturelle suffisamment large pour inclure les réseaux de pratiques de soin, d’acteurs et actrices et d’institutions de la santé. Qu’il s’agisse de l’identité, de la diversité, du patrimoine, de la communauté, de la participation, de l’éducation, de la formation, de l’information et de la coopération, on voit déjà combien tous ces paramètres constitutifs des droits culturels peuvent être pertinents pour l’action publique en matière de santé et de soin.

Sur cette base, esquissons une généalogie des droits culturels, ce qui nous permettra ensuite d’ouvrir des pistes de réflexion et donner matière à problématiser les actions du secteur des maisons médicales. Généalogie5, car les droits culturels ne sont pas issus d’une origine unique, ils sont plutôt « éclatés et fragmentés entre plusieurs sources en droit international des droits de l’homme, entre instruments de protection de certaines catégories de personnes et instruments universels » (Céline Romainville parle de « nébuleuse de droits fondamentaux » et en appelle à une clarification)6. Il s’agit ici de retracer les trajectoires conceptuelles des droits culturels pour en clarifier les tenants et aboutissants, pour en dégager des points de débats entre les différentes filiations. Comme sources de référence, on peut citer :

  • La Déclaration universelle des Droits de l’Homme (DUDH) de 19487, notamment l’article 22, qui évoque, dans le cadre de la sécurité sociale, « la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à la dignité et au libre développement de [la personnalité de toute personne, en tant que membre de la société] », ainsi que l’article 27 qui, en insistant sur le droit de participer à la vie culturelle8, mais en étant dépourvu de force obligatoire, va fonder toute une trajectoire des droits culturels basée sur l’accès et la participation à la culture.
  • Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels9, texte quant à lui juridiquement contraignant émis par l’Organisation des Nations unies (ONU) en 1966, va prolonger ces droits économiques, sociaux et culturels qu’on appelle aussi la deuxième génération des droits fondamentaux, en reprenant à son article 15 au rang des droits culturels : le droit de participer à la vie culturelle, le droit de bénéficier du progrès scientifique et de ses applications, le droit de bénéficier de la protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute production scientifique, littéraire ou artistique et la liberté scientifique et culturelle.
  • En Belgique, c’est en 1993 – soit quarante-cinq ans après leur formulation dans la DUDH – que les droits culturels sont intégrés dans la Constitution belge à son article 23, en tant que droit à l’épanouissement culturel et social.
  • Des instruments universels et régionaux font encore mention plus ou moins explicite des droits culturels. Pensons à la Déclaration universelle de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) sur la diversité culturelle de 2001 qui, si elle élargit la notion de culture à « l’ensemble des traits distinctifs spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social et qu’elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les façons de vivre ensemble, les systèmes de valeur, les traditions et les croyances », rapproche les droits culturels des enjeux propres à la diversité, aux débats sur l’identité et le pluralisme.
  • D’autres sources appellent à une extension du qualificatif « droits culturels » à d’autres droits tels que le droit à l’éducation, les droits linguistiques ou la liberté de culte, voire l’ajout de nouveaux droits à cette catégorie de « droits culturels » tel que le droit à l’identité culturelle.

Des sources multiples

Elles contribuent à la nébuleuse conceptuelle. Toutefois, l’on pourrait schématiser deux trajectoires conceptuelles majeures des droits culturels pouvant être mises en débat entre elles : celle de l’accès et la participation à la culture, et celle de l’identité et de la diversité. L’une défendue par Céline Romainville et l’autre par le Groupe de Fribourg en la personne de Patrice Meyer-Bisch ne sont certainement pas contradictoires. Disons que leur méthode de recherche et leur effectivité sont différentes, la première est plutôt juridique avec une analyse fine des textes de loi qui cherche à avoir des effets légaux et politiques, le deuxième reste ancré dans le droit, mais davantage pour le problématiser philosophiquement et avoir des effets sur les représentations. Des points de débats concernent entre autres :

  • La définition que l’une et l’autre trajectoire donnent de la culture avec, pour Romainville, une lecture plus restrictive centrée sur les beaux-arts et le patrimoine, et pour Meyer-Bisch, une lecture plus englobante du phénomène culturel qui est inspirée de l’anthropologie.
  • Le questionnement de la centralité des enjeux liés à l’identité culturelle et aux modes de vie dans les droits culturels étant donné que ceux-ci sont déjà protégés par le principe de non-discrimination dans la DUDH.
  • La réelle effectivité des droits culturels étant donné leur caractère général et abstrait, ainsi que la difficulté à traduire ceux-ci en politiques culturelles et dans les pratiques.

De ces débats, on peut retirer des raisons et des moyens pour stimuler l’intervention sociale et l’innovation en matière de politiques publiques. Ainsi, le décret du 21 novembre 2013 relatif aux centres culturels10 est un résultat visible et incarné dans le droit communautaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Si le texte reste complexe dans son appropriation11, en pratique il permet que se développent un surcroît de sens et de créativité des actions à travers l’observation et des outils d’évaluation au regard des droits culturels de même qu’un partage plus organique et ancré des territoires d’action à travers des logiques de coopération entre partenaires socioculturels. Dans ce secteur, les droits culturels se font levier du pouvoir d’agir des acteurs et actrices de terrain et des populations à la mesure que ces droits sont intégrés dans les pratiques. De manière transversale, ils permettent de mettre en lumière la question des langages dans les pratiques, la nécessité et l’effort de traduction entre les codes formels et informels, théoriques et pratiques, institutionnels et de terrain ; les questions du temps et du plaisir à prendre dans les actions menées pour favoriser un épanouissement des participants et des acteurs ; enfin, la question de leur responsabilité autant celle des élues et élus et des institutions. Certes, les secteurs des centres culturels et des maisons médicales divergent dans leur visée et leur action, néanmoins, et on le retrouve dans ces aspects transversaux, ils convergent vers le projet social, politique et culturel commun d’une société plus accessible, participative et engagée sur des valeurs, des libertés et des devoirs. De là, à se servir des droits culturels comme support d’analyse et de réflexion de l’action des maisons médicales, il n’y a qu’un pas…

Une responsabilité partagée

À dire vrai, ce pas est à prolonger plus qu’à impulser. Cela suppose une participation intersectorielle de nombreux acteurs et actrices socioéconomiques et politiques au-delà de la santé et de la culture.

Les gouvernements ont des obligations envers les titulaires de droit, mais aussi envers les institutions qu’ils doivent soutenir afin d’œuvrer équitablement à la protection sanitaire et au patrimoine culturel. De façon complémentaire, les acteurs et actrices et les titulaires ont aussi une responsabilité envers leurs institutions de santé et de culture. Tant pour la culture que pour la santé, il est nécessaire d’avoir des visions à court, moyen et long terme quand on observe la diffusion des premiers textes au sortir de la Deuxième Guerre mondiale et leur rayonnement actuel qui est encore à amplifier dans la perspective d’un développement durable. Pour ce faire, il faut considérer les enjeux identitaires et communautaires en termes de santé et de culture. Il faut favoriser l’information, l’éducation, l’autonomie, la participation et la coopération des acteurs et actrices et des expertises. Tout ceci pour tâcher de faire commun à travers les pratiques, pour développer ensemble des institutions ouvertes à la diversité.

Un point de travail en ce sens serait le développement de « compétences transculturelles cliniques »12, ce que peut soutenir l’anthropologie médicale à travers une problématisation de la culture ainsi que les droits culturels en tant que supports d’analyse et d’évaluation de l’effectivité des actions menées.


1. L’ensemble du numéro 99 de la revue est disponible via le lien suivant : https://www.maisonmedicale.org/-La-culture-c-est-bon-pour-la-sante-.html

2. T. Nathan, Nous ne sommes pas seuls au monde, Le Seuil, 2001.

3. I. Stengers, Réactiver le sens commun : Lecture de Whitehead en temps de débâcle, La Découverte, 2020.

4. M. Vanderveken, B. De Reymaker, « La dimension culturelle de la santé », Le Journal de Culture & Démocratie n° 36, novembre 2014.

5. F. Nietzsche, La généalogie de la morale, Gallimard, 1985. M. Foucault, L’archéologie du savoir, Gallimard, 1969.

6. C. Romainville, Pour comprendre les « droits culturels » et le droit de participer à la vie culturelle, Culture et Démocratie, 2013.

7. http://www.un.org

8. La Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles viendra en 1982 préciser ce que l’on peut comprendre par « vie culturelle en la détaillant en termes de patrimoine culturel, de création artistique et intellectuelle et d’éducation artistique, etc. », https://unesdoc.unesco.org.

9. http://www.ohchr.org. On pourrait également citer le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, également adopté en 1966 par l’ONU, qui précise d’importantes composantes du droit de participer à la vie culturelle.

10. Moniteur belge, 29 janvier 2014.

11. Une recherche participative que je coordonne accompagne les centres culturels en vue d’intégrer les référentiels des droits culturels au sein des actions culturelles et de développer l’effectivité de ces droits dans les pratiques : https://plateformedroitsculturels.home.blog/.

12. P. Hudelson « Que peut apporter l’anthropologie médicale à la pratique de la médecine ? », Santé conjuguée n° 48, octobre 2008.

15 ans de la Déclaration de Fribourg

A l’occasion du 15e anniversaire de la Déclaration de Fribourg, la Plateforme d’observation des droits culturels s’est rendue à l’Université de Fribourg pour participer aux deux journées consacrées à ce texte de référence en matière de droits culturels. Bon nombre de professionnel·les de ces matières juridiques ainsi que des secteurs culturels, sociaux et administratifs s’étaient réuni·es en vue d’entamer un travail de révision de la Déclaration et de rédaction d’un second texte sur les dimensions culturelles des autres droits humains. Les enjeux étaient donc de taille ! On en est ressorti enrichi de rencontres humaines significatives et d’échanges ouvrant sur de nouvelles perspectives de travail !

Plusieurs chercheur·ses sont intervenu·es sur des questions débattues dans le contexte des droits culturels. Qu’il s’agisse :

  • de la pertinence de ces matières juridiques par rapport aux conflits actuels et des exigences propres à une paix durable, de l’ambivalence propre au dissensus comme moteur de démocratie ;
  • de la valeur primordiale de l’information, comme base de tous les autres droits culturels ;
  • de la nécessité de faire commun à travers des mémoires et des patrimoines capables de prendre en compte la multiplicité des appartenances ;
  • de l’évolution du phénomène religieux, de la nécessité du dialogue interculturel plutôt que des postures relativistes, universalistes et réductrices des spécificités des cultures ;
  • de l’importance des droits culturels en matières de trajectoires migratoires.

S’en est suivi une table ronde autour des perspectives qu’ont offertes les droits culturels, de leurs succès mais aussi des défis actuels que la Déclaration doit encore relever. Le prisme des droits culturels et ce texte en particulier a permis de développer la participation culturelle en termes de méthodes et de contenus par rapport à des enjeux de co-construction, de création partagée, de coopération… En même temps, il s’est agi de questionner la dimension « opératoire », l’effectivité desdits droits, leurs effets concrets selon les pratiques et les pays. Par exemple, une recherche récente sur la réception de la Déclaration de Fribourg en Amérique Latine montre à quel point le texte tient lieu de socle pour appréhender la diversité et la multiculturalité dans le cadre des politiques publiques. Pensons à l’exemple de la Convention constituante au Chili qui fait de la culture un des enjeux majeurs à la suite de luttes sociales et économiques. Par ailleurs, en France, notamment avec la loi NOTRe, s’est posée la question de la mise en pratique de ces droits. C’est dans une optique pédagogique que s’est alors développée la démarche Paideia comme espace de travail, de réflexions sur les pratiques et les méthodologies de travail autour des droits culturels et de la Déclaration de Fribourg.

Si l’effectivité concrète des droits culturels est en progression dans différents territoires, cela reste une tâche au long cours qui pose plusieurs défis et problèmes liés à la mise en œuvre des normes juridiques. Le premier tient au degré même de référence aux articles de la Déclaration, ainsi qu’à la nécessité de nommer ces droits en tant que tels dans les pratiques de terrain ? L’intérêt en ce sens est de croiser les perspectives sur ces droits, celle de la Déclaration basée sur un travail conceptuel mais aussi celles théorisées par d’autres chercheurs·es en droits culturels ou dans les dimensions culturelles des droits humains, comme la recherche de Céline Romainville ancrée dans l’examen des textes juridiques. D’autres défis sont ceux que posent les droits culturels en termes de droits individuels et de droits collectifs, comment concilier les différentes réalités humaines à travers les droits pour être autant dans « le seul » que dans le « en commun », en vue de favoriser l’inclusivité et pointer vers l’intersectionnalité ? Comment intégrer des enjeux écologiques liés au développement durable qui soient décentrés de la stricte perspective humaine, plus particulièrement comment inclure des enjeux liés aux droits environnementaux, aux droits des écosystèmes et de la nature ? Comment soutenir et dynamiser d’autres types de fabrication de savoirs, qui prennent en considération des facteurs de symétrisation des savoirs, qui soutiennent d’autres modes de connaissance et d’expérience que celles propres aux paradigmes occidentaux ? Comment faire en sorte que les droits culturels résistent à l’instrumentalisation et la récupération politique, pour éviter qu’ils ne servent que de couche superficielle sans qu’aucune refondation des politiques publiques ne soient véritablement en cours ? Comment partager la responsabilité entre les différents niveaux de pouvoir quant à la mise en œuvre et l’effectivité des droits culturels ?

Pour tâcher d’adresser ces défis et problèmes, une première étape de travail a été de constituer des groupes en vue d’une révision de la Déclaration. Plusieurs sous-groupes sont partis du texte même de la Déclaration, un autre sous-groupe a mis en exergue la dimension transversale du numérique dans ce texte, et enfin, un dernier sous-groupe a questionné les enjeux de guerre et de paix à partir des articles de la Déclaration. Lors de la mise en commun des sous-groupes, est ressortie la nécessité de mieux interconnecter les droits entre eux, de mieux articuler les droits et les ressources disponibles, de veiller aux rapports aux êtres vivants, au non-humain, à l’environnement ainsi qu’aux dimensions collectives des droits. Une piste de travail en ce sens serait de préciser les définitions et compléter les terminologies utilisées dans la Déclaration, en ce qui concerne les questions de réparation et de prévention des conflits. Une autre piste serait d’étoffer le commentaire de la Déclaration pour y intégrer des enjeux portés par le numérique en matière de droits humains, des enjeux propres à la découvrabilité1, à la transformation des pratiques et usages, au non recours des droits culturels. Pour ce qui est à venir, des groupes de travail vont prolonger ces premières impulsions et les amener à se concrétiser dans le texte de la Déclaration et son commentaire.

La Plateforme (Maryline et Thibault) en plein échange avec différents intervenant·es (Groupe de Fribourg, Paideia, autres institutions et universités).

Une deuxième étape de travail a interrogé la centralité des droits culturels au sein des droits humains. À travers des groupes de travail thématiques, l’objectif était d’explorer les dimensions culturelles des droits humains au-delà des droits culturels au sens strict. Ce faisant, il s’est agi d’approcher les multiples dimensions du phénomène culturel pour tâcher d’en enrichir sa compréhension, pour en tracer les logiques systémiques et complexes à partir des droits humains. Réciproquement, l’enjeu était aussi de préciser dans quelle mesure l’objet même du droit est culturel, puisqu’il se situe dans une relation. Par exemple l’alimentation tient fondamentalement de la culture et pas juste dans ses usages ou d’un simple enjeu d’accès à la nourriture. Et ceci, même dans les situations d’urgence alimentaire. Interroger le droit à l’alimentation dans une logique de droits culturels signifie s’interroger et mettre en exergue les enjeux de dignité qui se jouent autour de l’objet du droit en lui-même (la nourriture) et travailler plutôt sur les relations de sens activées par l’acte de s’alimenter.2

Suivant la même logique de dignité, les groupes de travail ont débattu de la dimension culturelle des autres droits humains.

Vu l’ampleur de la tâche, ces groupes ont débuté leur travaux en balisant les champs conceptuels selon différents aspects. Qu’il s’agisse :

  1. du « travail », de sa signification, la créativité qu’il permet, de sa centralité sociale et de la métaphore de la culture comme un travail, des conditions dans lesquelles le travail s’exerce et de la liberté de pouvoir le choisir ou de faire le choix de ne pas travailler… ;
  2. du « soin », comme relation d’interdépendance et mode d’attention, de place de la dignité, de la transmission des pratiques de soin et la coproduction de ses savoirs, de la gouvernance, de l’institution des espaces de soin comme espaces de production de représentations culturelles… ;
  3. de l’« alimentation », de la dignité de son accès, des systèmes alimentaires, de ce que nourrir implique notamment dans son lien avec le vivant et les relations sociales, de la transmission et des savoir-faire, de la protection par l’État en contexte d’urgence mais aussi dans les situations courantes… ;
  4. de l’« habitat et du territoire », de la notion d’appropriation, des conditions d’habitat et des usages, de l’hospitalité, du rapport à l’environnement, de la spiritualité et la mémoire, des standards, de l’espace-temps et du territoire… ;
  5. de la « liberté d’expression », de sa nécessité de précision selon les contextes et milieux culturels, selon qui parle et comment, de l’enjeu de la réponse et de la relation de communication… ;
  6. de la « liberté d’association », des impacts économiques, sociaux et politiques, de la démocratie culturelle et du rôle de l’association dans la fabrique de la société, du pouvoir d’agir, de la régulation, de la responsabilité des acteurs publics, privés et sociaux,

Le travail des différents groupes thématiques est donc à poursuivre mais cette première étape ouvre déjà des perspectives autour d’une culture de la dignité à partir des dimensions culturelles des droits humains. Cela amorce une approche culturelle de la dignité dans laquelle la notion de jouissance aurait un rôle complémentaire à jouer avec la notion de reconnaissance. Des travaux enthousiasmants qui seront relayés sur le blog au fur et à mesure des avancées, la Plateforme participera d’ailleurs étroitement au groupe de travail sur le soin.

Sur le chemin enrichissant et lumineux du retour

1. La découvrabilité renvoie à la capacité d’un contenu d’être découvert, à la faculté de le rendre accessible et visible ainsi que de le mettre en valeur. Pour plus d’infos : <https://culturelaval.ca/guide-decouvrabilite-des-contenus-numeriques/>.

2. Publié par Culture & Démocratie, l’article de Christine Mahy problématise les droits d’accès et de participation à la vie culturelle. Elle analyse comment la mise en œuvre de ces droits à travers des politiques sociales a pu contribuer à des effets négatifs tels que la déprivation culturelle ou le manque de moyens pour accéder aux richesses culturelles. Par ce biais, elle appelle à lier la question des droits culturels à d’autres droits, à vérifier dans quelle mesure la culture produit de l’égalité ou de l’inégalité, ainsi qu’à promouvoir un droit à la reconnaissance citoyenne. Cfr Christine Mahy, « La mise en œuvre du droit de participer à la vie culturelle dans les politiques sociales », Cahier 05 de Culture & Démocratie, disponible en pdf <https://www.cultureetdemocratie.be/numeros/cahier-05-20-ans-de-culture-democratie-d-un-siecle-a-un-autre-nouveaux-enjeux-nouveaux-defis/>.

Cultiver les droits culturels – Expérimenter Paideia #2 – 08/02/2022

Faisant suite au premier volet du cycle de rencontres « Cultiver les droits culturels – Expérimenter Paideia #1/ Explorer, défricher : Introduction aux droits culturels » initié par l’ASTRAC et la Plateforme d’observation des droits culturels (Culture & Démocratie) le 16 novembre 2021 aux Abattoirs de Bomel à Namur, nous avons le plaisir de vous convier à ce nouvel évènement.

Nous aurons l’occasion de vous retrouver le mardi 8 février 2022 lors de la Journée professionnelle de l’ASTRAC à la Marlagne (chemin des Marronniers 26, 5100 Namur), lors d’un atelier pour analyser sa pratique au regard des droits culturels selon la méthode Paideia.

>>> Plus d’informations et inscription (obligatoire !) en suivant ce lien. <<<


Depuis fin 2012, Réseau Culture 21 développe en partenariat avec l’Institut interdisciplinaire d’éthique et des droits de l’Homme de l’Université de Fribourg (IIEDH) et son Observatoire de la diversité et des droits culturels la recherche-action appelée Paideia. Celle-ci a pour objectif d’analyser collectivement comment les droits fondamentaux et en particulier les droits culturels sont pris en compte dans les politiques et les actions de développement territorial.

L’analyse de « cas d’école » constitue un pilier central de la méthode Paideia. Elle permet d’interroger la prise en compte des droits culturels au sens large dans les différents aspects d’une action et vise à une plus grande effectivité de ces droits dans le cadre d’un programme dépassant l’échelle de celle-ci.

Le plus souvent, la réalisation d’une analyse de cas se concrétise individuellement, par écrit pour donner lieu à une « fiche de cas ». À l’occasion de la Jpro2022, les participants auront l’occasion de tester l’approche collectivement, sous la forme d’un atelier basé sur l’écoute active.


Animation : Julia Bailly (ASTRAC), Valérie Lossignol (Central – Centre culturel de La Louvière, ASTRAC), Pascale Piérard (Centre culturel Ourthe et Meuse, ASTRAC) et Liesbeth Vandersteene (ASTRAC).
Nous serons accompagnées par Luc Carton, philosophe, vice-président de l’Observatoire de la diversité et des droits culturels (Fribourg, Suisse), ancien inspecteur FWB et Jean-Luc Piraux, comédien.

Parlez-vous droits culturels ? – 13 décembre 2021

Lundi 13 décembre 2021, 9h30-16h30

PointCulture Bruxelles, rue Royale 145, 1000 Bruxelles.

La Plateforme d’observation des droits culturels (Culture & Démocratie), La Concertation asbl-Action Culturelle Bruxelloise et l’Association Marcel Hicter ont initié différentes démarches qui explorent les droits culturels et œuvrent à leur culture commune. Elles vous invitent à venir parler « droits culturels » lors d’une journée d’information et d’expérimentation au départ de leurs recherches.


Programme

9h15 | Accueil et café


9h30 | Introduction : différentes approches de la mise en pratique des droits culturels
Avec : Paul Biot (Culture & Démocratie, Théâtre-action), Lara Lalman (La Concertation),
Mathias Mellaerts (Association Marcel Hicter), Marie Camoin (Article 27), Liesbeth
Vandersteene (ASTRAC) et Morgane Degrijse (Plateforme d’observation des droits culturels, Culture & Démocratie)


10h15 | Observer l’exercice des droits culturels ? – Retours sur les travaux de la Plateforme d’observation des droits culturels
Avec : Morgane Degrijse (Plateforme d’observation des droits culturels, Culture & Démocratie)


10h30 | Discussion-débat avec les centres culturels partenaires de la recherche : comment observer l’exercice des droits culturels ?
Avec : Thierry Wenes (centre culturel de Fosses-la-Ville), Pascale Piérard (centre culturel
Ourthe et Meuse), Emilie Lavaux (centre culturel de Genappe) et d’autres intervenant·es à confirmer
Animation : Liesbeth Vandersteene et Morgane Degrijse


11h15 | Pause-café


11h30 | Suite des débats de la matinée

12h15 | Repas


13h30 | Ateliers : En quoi ce que je fais et la façon dont j’agis participent à la réalisation des droits culturels ?

Expérimentation des outils développés par Mathias Mellaerts (Association Marcel Hicter), Aliette Griz (Midis de la Poésie), Virginie Cordier, Thibault Janmart et Laetitia Raesschaert (La Vénerie), Amélie Michaud et Antoine Schwarz (Maison de la Création), Edith Grandjean (Wolubilis), Hélène Janssens (Archipel19), Olivier Roisin (Mouvance asbl), Lapo Bettarini et Lara Lalman (La Concertation asbl) et Paul Biot (Culture & Démocratie).

1) Les droits culturels en images

Explorer les droits culturels et les associer à une pratique associative et/ou professionnelle.

2) La culture, toi et moi

Faire émerger les différentes représentations que recouvre le mot « culture » et explorer le rapport intime que nous entretenons avec elles.

3) La participation, une question d’attitude ?

Explorer et questionner sa posture relationnelle dans un cadre participatif.

4) Le jeu des citations cultes

Découvrir l’histoire des droits culturels de manière interactive et ludique.


15h30 | Pause-café


15h45 | Avec quoi repartons-nous ?


16h15 | Conclusions

Avec : Luc Carton (Culture & Démocratie)


Un retour sur l’ensemble de la journée peut être trouvé sur le blog de La Concertation asbl

Bientôt une partie des interventions (introductions, table ronde et conclusions) disponibles en ligne sur ce blog !