
Les droits culturels sont depuis quelques années de plus en plus mobilisés dans les politiques culturelles de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Recommandés comme boussole pour orienter l’action, cités en marge de rapports ou encore placés au centre de décrets, où et comment en parle-t-on ? Est-ce pour autant que les droits culturels se trouvent véritablement au cœur des considérations politiques ?
Cet article fait partiellement le point sur la situation.
Pour une analyse plus poussée, se référer notamment aux volumes 8, 9 et 10 du magazine Repères de l’Observatoire des politiques culturelles.
1. Un futur pour la culture
Le rapport Un futur pour la culture, a été publié dans le courant de l’été 2020 afin de proposer des pistes concrètes en vue du redéploiement de la culture en Fédération Wallonie Bruxelles. Il s’agit de développer, à bref délai, des solutions politiques innovantes pour faire face à la crise causée par le confinement dans le secteur culturel, d’en organiser le redéploiement et d’expérimenter de nouvelles politiques. Ce groupe de réflexion présidé Par Céline Romainville (UCLouvain) et Philippe Kauffmann (Mons Arts de la scène) réunit une cinquantaine de personnes : expert·es, artistes, créateurs et créatrices, acteur·ices du monde associatif, responsables d’institutions et de lieux de création et de diffusion…
Ce plan de relance prend comme boussole les droits humains, et en particulier la protection et la promotion des droits culturels. Il est articulé autour de trois axes prioritaires: le soutien à la création, le soutien à la médiation et à la participation culturelle et le numérique. Pour chaque axe, sont d’abord détaillés les points d’attention prioritaire et, ensuite, des propositions d’opérationnalisation. Les six points d’attention transversaux sont: la transversalité, le décloisonnement et la perméabilité ; une nouvelle gouvernance ; le temps et la recherche ; la proximité et l’ancrage territorial ; l’égalité et la non-discrimination dans l’accès à la création, l’accès et la participation à la vie culturelle ; la soutenabilité.
Un futur pour la culture, 13/07/2020, p. 4, « L’égalité et la non-discrimination dans l’accès à la création, l’accès et la participation à la vie culturelle » :
Il faut garantir les droits culturels des artistes, publics et professionnels invisibilisés, mettre en œuvre le droit à l’expression artistique et le droit de participer à la vie culturelle pour toutes et tous, sans distinction fondée sur l’origine ethnique, la prétendue race, le contexte socio-culturel, le genre ou le handicap. Ceci implique notamment de lever les obstacles qui se dressent encore pour les artistes et professionnel.le.s non-blanc.he.s et pour les femmes dans le milieu professionnel (par l’élaboration de mesures concrètes et contraignantes relatives à l’engagement et l’inclusion d’artistes et professionnel.le.s femmes et non blanch.e.s) et la mise en place de mesures concrètes pour l’accès de tous les publics à des propositions culturelles reflétant une diversité de conception de la vie et de représentations du monde.
Consulter le texte dans son intégralité ICI.
2. Déclaration de politique 2019-2024 (FWB)
La Déclaration de politique de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour 2019-2024 n’oublie pas non plus les droits culturels.
p. 32, Chapitre 7. « Lutte contre toute forme d’exclusion » :
Le Gouvernement réaffirme que la Fédération Wallonie-Bruxelles est une entité accueillante et veillera à le garantir en luttant contre toutes les causes d’exclusion.
L’analphabétisme, qui touche une personne sur dix, doit être combattu et des dispositions prises pour éviter de creuser les inégalités dans l’accès à l’information. Les nouvelles technologies seront au service des usagers de tous les services publics, pour garantir l’accès au droit, à la culture, aux médias, etc.
Le Gouvernement soutiendra les actions de prévention pour les jeunes en difficulté par la participation, la citoyenneté, la culture, le sport, etc.
Le Gouvernement poursuivra l’accueil et l’hébergement des enfants pour lesquels ce besoin est nécessaire, quel que soit leur statut. Il veillera notamment à l’accueil et la scolarisation des primo-arrivants.
p. 40 :
À cet égard, le Gouvernement s’engage à:
- Assurer à toutes les personnes vivant en Fédération Wallonie-Bruxelles d’exercer pleinement leurs droits culturels, dès le plus jeune âge, dans les milieux d’accueil et à l’école au travers du parcours d’éducation culturelle et artistique (PECA) ;
- Offrir une éducation culturelle et artistique pour toutes et tous tout au long de la vie (via le parcours d’éducation culturelle et artistique, dans les milieux d’accueil, dans l’enseignement obligatoire, dans les académies, dans les écoles supérieures des arts, par la pratique en amateur, dans les maisons de jeunes, dans les AMO, etc.) ;
- Renforcer la coopération volontaire entre les réseaux scolaires et culturels et adapter le transport et les horaires afin d’inciter à la généralisation du PECA ;
- Valoriser les spécificités de l’action associative critique et active ainsi que renforcer l’éducation permanente dans son rôle capital en matière de participation citoyenne et de démocratie culturelle ;
- Renforcer l’accès à la culture pour tous notamment à travers l’accessibilité financière des activités culturelles (avec un accent sur les publics scolaires), l’accessibilité en transports en commun, l’accessibilité physique des bâtiments, l’accessibilité renforcée pour les personnes déficientes sensorielles, en veillant à ce que chacune et chacun puisse franchir la porte des lieux culturels et participer activement aux pratiques culturelles, artistiques et créatives.
Consulter le texte dans son intégralité ICI.
3. Décret relatif aux centres culturels
Le décret de la Fédération Wallonie-Bruxelles du 21 novembre 2013 relatif aux Centres culturels place les droits culturels au cœur de leurs missions.
Les droits culturels y sont définis dans son Article 1er :
Droit à la culture : au sein des Droits humains, l’ensemble des droits culturels tant en termes de créances que de libertés, individuelles et collectives, comprenant notamment :
- la liberté artistique, entendue comme la liberté de s’exprimer de manière créative, de diffuser ses créations et de les promouvoir ;
- le droit au maintien, au développement et à la promotion des patrimoines et des cultures ;
- l’accès à la culture et à l’information en matière culturelle, entendu comme l’accès notamment économique, physique, géographique, temporel, symbolique ou intellectuel ;
- la participation à la culture, entendue comme la participation active à la vie culturelle et aux pratiques culturelles ;
- la liberté du choix de ses appartenances et référents culturels ;
- le droit de participer à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques et programmes, et à la prise de décisions particulières en matière culturelle.
Ainsi que dans son Article 2 :
Le présent décret a pour objet le développement et le soutien de l’action des centres culturels afin de contribuer à l’exercice du droit à la culture des populations, dans une perspective d’égalité et d’émancipation.
L’action des centres culturels : 1° augmente la capacité d’analyse, de débat, d’imagination et d’action des populations d’un territoire, notamment en recourant à des démarches participatives ; 2° cherche à associer les opérateurs culturels d’un territoire à la conception et à la conduite d’un projet d’action culturelle de moyen et long termes ; 3° s’inscrit dans des réseaux de coopération territoriaux ou sectoriels.
L’action des centres culturels contribue à l’exercice du droit à la culture et plus largement, à l’exercice de l’ensemble des droits culturels par tous et pour tous dans le respect de l’ensemble des droits humains.
L’action des centres culturels favorise le plaisir des populations de la découverte culturelle par les pratiques qu’ils déploient.
Consulter le décret dans son intégralité ICI.
4. Décret relatif à l’éducation permanente
Les droits culturels ont également une place de choix dans le décret de la Fédération Wallonie-Bruxelles du 17 juillet 2003 relatif au développement de l’action d’Éducation permanente dans le champ de la vie associative modifié le 14 novembre 2018 (mis à jour le 24/12/2020).
Son Article 1er énonce :
Le présent décret a pour objet le développement de l’action d’éducation permanente dans le champ de la vie associative visant l’analyse critique de la société, la stimulation d’initiatives démocratiques et collectives, le développement de la citoyenneté active et l’exercice des droits civils et politiques, sociaux, économiques, culturels et environnementaux dans une perspective d’émancipation individuelle et collective des publics en privilégiant la participation active des publics visés et l’expression culturelle.
Cet objet est assuré par le soutien aux associations qui ont pour objectif de favoriser et de développer, principalement chez les adultes : a) une prise de conscience et une connaissance critique des réalités de la société; b) des capacités d’analyse, de choix, d’action et d’évaluation; c) des attitudes de responsabilité et de participation active à la vie sociale, économique, culturelle et politique.
La démarche des associations visées par le présent décret s’inscrit dans une perspective d’égalité et de progrès social, en vue de construire une société plus juste, plus démocratique et plus solidaire qui favorise la rencontre entre les cultures par le développement d’une citoyenneté active et critique et de la démocratie culturelle.
Consulter le décret dans son intégralité ICI.
La Plateforme se réjouit de ces références aux droits culturels et espère encore les voir se multiplier à l’avenir, au point de constituer un nouveau référentiel des politiques culturelles de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
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